Extrémisme de droite en Suisse en 2007/2

Lucerne, 15 Janvier 2007

« Contre cet état multiculturel et la mafia rouge »

« Les gens naissent libre et égaux en droit et le demeurent » – ce fondement des droits de l’homme qui remonte à la Déclaration des droits de l’Homme de 1789 a été néanmoins constamment remise en question. D’abord par les patriciens et les aristocrates, plus tard par un conservatisme, en partie modernisé, en partie vulgairement réactionnaire à l’ombre duquel s’est développé une droite anti-démocratique . Au plus tard après la première guerre mondiale se développe dans tous les pays européens des mouvements et des partis à tendance nationaliste, anti-démocratique, anti-sociale, anti-sémite et opposés à la modernité. Ces mouvements se distinguent par leur organisation hiérarchique, où l’autorité est souvent incarnée par un leader. Ils ont pour objectifs de limiter ou même de supprimer les libertés civiques et les grandes utopies sociales nées de la révolution française basée sur la liberté, l’égalité et la fraternité. Ils souhaitent donc réduire les libertés individuelles et politiques pour instituer une démocratie autoritaire, voire une dictature. Concrètement cela signifie réduire les droits parlementaires et renforcer l’exécutif, qui devrait être incarné par un seul homme. La limitation des droits démocratiques vise en particulier les organisations socialistes ou communistes auxquelles la droite extrémiste reproche leur internationalisme. Les attaques à l’encontre des organisations et des personnes de gauche s’articulent souvent autour d’un discours antisémite. L’extrémisme de droite continue à alimenter le mythe de la conspiration « des Juifs et des Franc-maçons qui dirigent le capitalisme mondial et le bolchevisme ».

La plupart des organisations d’extrême droite excluent de leurs membres les personnes de religion juive ainsi que celles appartenant à des « sociétés secrètes », par exemple les Franc-maçons. Parmi les plus importantes de ces organisations à l’époque moderne figurait le Nationalsozialistische Arbeiterpartei NSDAP allemand sous Hitler et le parti fasciste italien sous Benito Mussolini. Mais même dans les pays ou l’extrême droite n’est pas parvenue au pouvoir, des organisations similaires existaient. Par exemple en Hongrie le parti des Croix fléchées, en Roumanie la Légion noire, en Suisse les groupes frontistes, dont le plus important fut le Front national.

Qu’est-ce que l’extrémisme de droite ?

Comme d’autres notions du champ politique et social, le concept d’extrémisme de droite ne se laisse pas définir de façon strictement scientifique.
On entend sous « extrémisme de droite » – selon la définition très utilisée de Wilhelm Heitmeyer – une tendance politique qui réunit une idéologie de l’inégalité avec celle de la violence . L’idéologie de la violence comprend des degrés divers. Il peut s’agir de la conviction de la nécessité de faire usage de la violence (pour résoudre des problèmes de société), d’une approbation à l’égard de la violence exercée de façon privée ou par l’état, d’une préparation à la violence jusqu’à des actes effectifs de violence. L’idéologie de l’inégalité se rapporte aux personnes et aux groupes qui visent la dévalorisation d’une part et l’exclusion d’autre part dans la vie quotidienne. La dévalorisation se manifeste par la surestimation de soi qu’elle soit nationaliste ou ethnique, dans la hiérarchisation des races, dans la distinction eugénique entre ceux qui méritent ou ne méritent pas de vivre, dans des considération sociobiologiques d’une « hiérarchie naturelle », sur une forme de darwinisme social soulignant le droit du plus fort, sur une conception totalitaire de la « norme » qui dénigre la différence et plaide pour l’homogénéité. L’exclusion vise à traiter différemment « l’autre » ou de l’étranger sur le plan social, économique, culturel, juridique et politique.
Sont perçu comme « autre » ou « étranger » des minorités mal vues de la population, par exemple les punks, les militants anti-racistes, les homosexuels et les lesbiennes, les handicapés, les sans-logis, les juifs et les musulmans, les hommes et femmes noirs de peau, indépendamment de leur nationalité.

Urs Altermatt et Damir Skederovic ont utilisé une définition similaire de l’extrémisme de droite en s’appuyant sur le politologue Hans-Gerd Jaschke. Ils ont résumé l’extrémisme de droite par « l’ensemble des convictions, des comportements et des actes, organisés ou non, qui procèdent d’une vision raciste ou ethnique des inégalités sociales, exigent l’homogénéité ethnique des peuples et refusent la philosophie d’égalité de la déclaration des droits de l’homme. Cette vision place la communauté avant l’individu, soumet le citoyen à la raison d’état, récuse le pluralisme d’une démocratie libérale et souhaite amoindrir la démocratie. »

L’extrémisme de droite comprend un certain nombre d’éléments qui apparaissent sous diverses formes et dans des combinaisons variables selon les courants d’idées, les groupements et les mouvances.

1) Nationalisme agressif et/ou ethnocentrisme qui se manifeste par de la xénophobie et la haine de l’étranger.
2) Racisme basé sur conception biologique de l’être humain et créant des distinctions ethniques et culturelle entre ces derniers.
3) Antisémitisme qui se manifeste soit ouvertement, soit de façon cachée et qui a pour corollaire  la minimisation voire le déni total des crimes du national-socialisme.
4) Autoritarisme qui exige un état fort relié à la figure d’un leader charismatique.
5) Anti-égalitarisme social, qui professe un « ordre naturel » hiérarchique et organique.
6) Accentuation de la communauté dans le sens d’une homogénéité culturelle, ethnique ou sociale.
7) Anti-pluralisme politique et social, qui se méfie de l’opinion publique démocratique et du processus de décision qui en découle.
8) Acceptation de la violence qui s’exprime dans les conflits politiques et sociaux.
9) Style démagogique, qui se manifeste par une agressivité de langage et la diffamation de l’adversaire.
10) Conviction de détenir la vérité, ce qui rend la tolérance sociale impossible .

La défaite militaire du Troisième Reich et la révélation des crimes du régime nazi ont rendu l’extrémisme de droite politiquement impossible dans la plupart des pays durant ces dernières décennies. Cependant depuis la fin des années 1940, on a observé quelques tentatives isolées de la part de quelques nationaux-socialistes ou fascistes indéfectibles, par exemple le lausannois Gaston-Armand Amaudruz.  Mais ce n’est que depuis les années 80, que s’est créée graduellement en Suisse une subculture d’extrême droite, dont la partie émergeante a été le « petit printemps des fronts » en 1989 . Le groupe proportionnellement le mieux représenté était celui des skinheads, plus précisément les skinheads se réclamant de l’idéologie nazie. Bien que se laissant difficilement organiser en entité politique, cette mouvance répand son idéologie via diverses manifestations, en particulier des concerts. Ce sont régulièrement des skinheads de tendance nazie qui ont été reconnus coupables des incendies de bâtiments abritant des requérants d’asile, d’attaques contre des personnes de groupes minoritaires et de propagande raciste. Les discours ont donc été suivis par des actes.

A l’ombre du camp nationaliste conservateur s’est développée depuis 1985 une subculture marginale et cependant grandissante d’extrémistes de droite. Celle-ci est constituée principalement de jeunes adultes mâles, plus précisément des skinheads de tendance nazie et des “patriotes”, mais aussi de quelques négationnistes de l’holocauste, d’activistes dans des campagnes politiques et de militants dans des organisations à caractère politique ou culturel, qui veulent promouvoir l’extrême droite par un travail idéologique. Comment se présente cette mouvance en 2007?

Subculture d’extrême droite – skinheads, nazis et “patriotes”

La plus grande partie des jeunes suisses d’extrême droite se regroupe en diverses subcultures, principalement les skins à tendance nazie, quelques NS-Heavy-Metal  et quelques Gothic-Darkwave . A côté de ces groupes, existent d’autres cliques ou groupuscules de “patriotes” faiblement structurés. Il s’agit plutôt d’un milieu que d’une “scène”. Les “patriotes” se caractérisent par un nationalisme militant, un refus vis-à-vis de certains groupes d’étrangers (par exemple des hommes des différentes régions d’ex-Yougoslavie, d’Afrique ou d’Asie) ainsi que des Suisses se réclamant de la gauche. Les frontières de ce milieu sont poreuses, d’une part en direction des skins à tendance nazie de l’autre vers les groupements et les partis néo-conservateurs.
La subculture “Skinhead” est née dans les années 60 parmi la jeunesse de Grande-Bretagne. Y était représentés surtout des jeunes hommes des milieux ouvriers. Ils était fans d’alcool et de football, aimaient la musique Ska des jeunes migrants jamaïcains. Ils recherchaient l’attrait de tapages occasionnels et s’opposaient aux jeunes à cheveux longs, en particulier aux Hippies et également à certains immigrants d’origine indienne. Mais ils n’étaient pas explicitement néonazis ou extrémistes de droite . C’est seulement au début des années 80, lorsque les deux partis britanniques fascistes, le National Front et le British National Party ont cherché à recruter des membres dans les stades de football qu’une mouvance skinhead s’inspirant de l’idéologie nazie s’est créée. En Suisse, les premiers Skinheads d’extrême droite sont apparus au début des années 80 à Zürich, dans le milieu des fans de football/hooligans, à l’époque en particulier le “Hardturmfront”.

Depuis plusieurs années, les skinheads suisses de tendance nazie se regroupent en sections locales ou régionales qui ne se réclament d’aucune direction commune ni même d’une appellation particulière. Ces skinheads sont pour l’essentiel âgés de 15 à 25 ans, ont un métier manuel, habitent dans des communes rurales ou de petites villes. Comme le formule le Service d’analyse et de prévention (SAP): « La mouvance extrémiste de droite est constituée de petits groupements non structurés, qui entretiennent entre eux des liens lâches et dont la composition et le nom changent fréquemment. »  Quant ils en portent un. « La mouvance extrémiste de droite en Suisse, poursuit ce service, ne partage aucune unité de vues, ni de base commune. On compte à l’heure actuelle environ un millier de sympathisants de ce milieu en Suisse. » Concernant la menace qu’elle représente, le document estime que: « Les activistes de droite perturbent parfois considérablement l’ordre et la sécurité publique, mais de façon ponctuelle et locale. La Suisse demeure un lieu particulièrement attractif pour l’organisation de concerts Skinhead et de manifestations apparentées  ». Ce que le SAP désigne par des “menaces ponctuelles de la sécurité publique” désigne en fait des actes qui peuvent avoir pour des membres de groupes minoritaires ou des requérants des conséquences gravissimes. En 2005, six skinheads de tendance nazie ont comparu devant le tribunal de district de Frauenfeld parce qu’en 2003, ils avaient à tel point tabassé un jeune fan de reggae de 15 ans qu’ils l’avaient laissé handicapé à vie. Motif invoqué par les inculpés: ils voulaient « tabasser des gauchistes » .

Sous la conduite politique du conseiller fédéral UDC Christoph Blocher, le Service d’analyse et de prévention (SAP) a repris l’habitude de minimiser le rôle des groupes d’extrême droite. Cela apparaît en particulier dans le « Rapport sur la sécurité intérieure 2006 »  publié en été 2007. Cependant le rapport affirme que dans 60 pourcents des 111 cas annoncés il avait été fait « usage de violence en particulier contre des personnes ». Le rapport souligne aussi que l’on a régulièrement retrouvé chez des extrémistes de droite des armes (généralement acquises légalement) et parfois en « quantités surprenantes ». Plus loin, il affirme que « seul environ quinze pourcents des activités de l’extrême droite ont des motivations politiques » . Cette conclusion n’est pas convaincante parce que le SAP ne  reconnaît pas comme de nature « politique » des concerts au cours desquels l’on joue des chansons qui font l’apologie du nazisme, qui agressent verbalement les étrangers et les noirs et sont porteuses d’une idéologie raciste .

Une procédure dans le canton de Lucerne éclaire la manière parfois négligente dont la police fédérale et la police en général conduisent les procédures pénales relatives aux extrémistes de droite. Début mai 2006, la police cantonale lucernoise a saisi une collection de CD d’un Hammerskin connu, en tout 185 exemplaires, au motif qu’il pouvait y avoir infraction à la norme pénale sur la discrimination raciale. La destruction des CDs incriminés a été ordonnée, mais la procédure a été suspendue après quelques mois. Jusqu’ici tout va bien. Puis le Tribunal fédéral a –sur plainte du Hammerskin – renvoyé l’ordre de saisie à l’instance précédente parce que la police fédérale et la police locale avaient négligé de faire un rapport exhaustif sur le contenu des CDs. « Dans le cas particulier il n’y avait pas d’indication concernant quels CDs avaient été vérifiés et sur quelle base il avait été conclu qu’ils contrevenaient à l’art. 261bis du code pénal. »

« Les fêtes patriotiques nous appartiennent »

Les extrémistes de droite se décrivent volontiers comme de « vrais patriotes ». « Les fêtes nationales nous appartiennent » revendique un bulletin interne d’un groupe d’extrémistes de droite début novembre 2007, en faisant appel à une commémoration nationale de la bataille de Morgarten, cette fois dans l’ombre de la fête officielle . Morgarten est le troisième endroit dans lequel les partisans de la sub-culture d’extrême droite sont apparus dans le cadre d’une manifestation officielle. Fin juin, ils ont pris part à la fête de la lutte de Sempach, le 1er août sur le Grütli et mi-novembre à Morgarten. Les organisateurs de la fête officielle réagissent toujours de la même façon : ils ferment l’œil sur la participation des extrémistes jusqu’à ce que les médias les forcent à prendre position. Cela avait débuté le 1er août 1996, lorsqu’une poignée de skinheads de tendance nazie avait versé dans la provocation. Les années suivantes, les sympathisants de cette tendance étaient toujours plus nombreux, sans que les organisateurs ni la police ne réagissent. En 2000 ils ont sifflé et chahuté le discours du conseiller fédéral Karspar Villiger. Cet événement et les débats qui s’en sont suivis ont attiré l’attention de l’opinion publique sur l’existence de ces groupuscules d’extrême droite et ont ouvert le débat sur  les modalités de poursuite de la manifestation du Grütli.

Hammerskinheads et Blood and Honour

Bien que la mouvance skinhead pro-nazie soit peu structurée en Suisse, deux organisations existent depuis des années avec des liens internationaux. Il s’agit d’une part des Hammerskinheads, fondés en 1986 à Houston/Texas en tant que fraternité blanche et donc raciste, revendiquant « des territoires blancs pour les hommes blancs » (white areas for white people). L’autre mouvement est le groupement Blood and Honour, fondé en Grande-Bretange en 1987 comme une « voix dissidente du rock contre le communisme ». Il s’agit d’une « organisation politique sans carte d’adhérent » . Elle a pour but de répandre l’idéologie néo-nazie à travers ses propres publications, des supports audio,  le commerce d’objets et d’insignes nazis, ainsi que l’organisation de concerts. Dans l’environnement Blood and Honour s’est également constituée une organisation terroriste (Combat 18, le chiffre 18 se référant à Adolf Hitler)  responsable d’attentats en Grande-Bretagne et en Suède.

Ces deux organisations ont également essaimé en Suisse. Déjà au début des années 90 les Nazis-skinheads de Suisse centrale ont fondé une section suisse, aujourd’hui la plus ancienne des sections  européennes encore existantes de la “nation Hammerskin”. Les Hammerskinheads suisses (SHS) sont connus pour être des organisateurs de concerts expérimentés. Dans les années écoulées, ils ont organisé régulièrement des grands concerts,
celui ayant réuni le plus grand nombre de participants étant le concert d’été du 10 août 2002 à Affoltern-am-Albis (environ 1’200 visiteurs de plusieurs pays européens).

Une section suisse de Blood and Honour est apparue seulement en 1997/98, d’abord en Suisse alémanique, puis en Suisse romande. Sa figure de proue est un ex-hammerskin, Olivier Kunz,  qui s’est immédiatement profilé comme organisateur de concerts, éditeur de publications ainsi que durant un certain temps distributeur de musique par correspondance. Après son jugement pour infraction contre la norme pénale sur la discrimination raciale et l’interdiction des concerts nazis-skinheads – en premier lieu dans le canton de Vaud – ces activités ont accusé un net recul, même si Blood and Honour Romandie est apparu comme co-organisateur de manifestations en 2003 et 2004 . En 2004, il a également été question d’une section zurichoise de Blood and Honour, dont on ne connaît cependant rien. Sur l’internet existe depuis longtemps une page “Combat 18” ainsi qu’un “Swiss Forum”qui s’est ouvert mi-août 2004 et dans lequel s’expriment aussi bien des skinheads alémaniques que romands. En automne 2007, un nouveau site « B&H » Suisse est apparu sur internet.

Brotherhood 28 Switzerland

Brotherhood 28 = la confrérie Blood and Honour, Suisse, s’est constituée à partir des structures Blood and Honour qui existaient jusque là.
On a peu entendu parler de ces deux réseaux skinhead-nazis en 2007 en Suisse. D’après certaines indications, l’on peut déduire que aussi bien Blood and Honour que C18 ainsi que les groupes Hammerskin sont actifs en Suisse, mais sont également ennemis entre eux. Dans des forums de discussion, certaines personnes se plaignent de cette « guerre fratricide ». L’apparition la plus visible a été la marche de démonstration des activistes Blood-and-Honour « contre les abus sexuels sur les enfants » à Appenzell. En automne est apparu un site « Brotherhood 28 », qui se pose en apparemment en concurrent des deux autres structures B&H. Il semble que ce soit une initiative d’un tout petit groupe de personnes. Un des membres du nouveau groupe genevois des Nationaux-socialistes suisses NSS apparaît également dans un forum Blood and Honour.

Nationaux-socialistes suisses NSS, section de Genève

En automne 2007 est apparue à Genève une section romande de Nationaux-socialistes suisses NSS. La NSS a honoré le 21 septembre 2007 le fondateur de Blood and Honour, Jan Stuart. Des photos montrent trois hommes et une femme, debout derrière une couronne mortuaire éclairée de bougies et faisant de la main droite le salut hitlérien . Fin novembre la section a publié le premier numéro de la gazette « Wotan’s Krieger », qui annonce également l’ouverture d’un futur site internet. Le cahier contient plusieurs interviews. A un représentant (non nommé) du parti nazi américain, on pose la question «  Luttez-vous pour les idées des négationnistes ? ». « Nous pensons que l’internationale juive a fabriqué le plus grand mensonge de l’histoire, pour éliminer le national socialisme et pour affaiblir notre race par un monde sans ordre et sans morale. Qu’en pensez-vous ? » Dans un texte sur le paganisme, l’auteur prétend que c’est une religion naturelle qui a été presque totalement éradiquée d’Europe par le Christianisme. « Le paganisme est la religion originelle, la véritable histoire du peuple et les écrits païens prouvent la supériorité de notre race. »  « Notre religion, que nous défendons fièrement comme le faisaient les SS et le troisième Reich, n’est pas morte et vit encore aujourd’hui. »

Projet national de recherche PNR40+

Il y environ six ans, le Conseil fédéral a décidé d’un projet national de recherche sur l’extrémisme de droite. La majorité des résultats sont aujourd’hui disponibles mais ne sont que partiellement convaincants. Le Conseiller fédéral Pascal Couchepin ne voit cependant pas de nécessité de poursuivre cette recherche.

Le 1er août 2000, le conseiller fédéral radical Kaspar Villiger a tenu un discours à l’occasion de la fête nationale sur la prairie du Grütli. Sur la colline, bien visible, se trouvait un attroupement de 100 à 120 skinheads à tendance nazie. Certains portaient des drapeaux suisses, l’un portait un drapeau noir orné du marteau et de l’épée, d’autres avaient des canettes de bière en main, d’autres encore portaient des croix celtes à la ceinture, symbole de supériorité de la race blanche. Certains faisaient le salut Kühnengruss, bras droit tendu avec deux doits écartés.
Les skins ont plusieurs fois interrompu le discours de M. Villiger par leurs imprécations «Dehors, dehors ». Ils ont scandé le slogan connu « voici venue la résistance nationale. Interrogé par la suite sur ces événements, M. Villiger a répondu : « Je ne connais pas ces gens, j’ignore ce qu’ils revendiquent politiquement. Cela m’intéresserait même de le savoir ». Au cours des mois qui ont suivi, le débat sur la question de l’existence longtemps ignorée d’une extrême droite en Suisse c’est enflammé, prenant parfois des proportions exagérées. Le Conseil fédéral a examiné le durcissement de la loi sur le vandalisme et de la norme pénale contre la discrimination raciale, en particulier l’interdiction de porter des insignes du national-socialisme. De son côté le Fond national de la recherche scientifique a ouvert un projet sur l’extrémisme de droite.

Dans l’intervalle, la loi sur le vandalisme s’est tellement durcie qu’elle en est devenue discutable du point de vue de l’état de droit, tandis que le durcissement de la loi anti-raciste est tombé aux oubliettes. A mon avis, les problèmes de société ne peuvent pas être traités prioritairement du point de vue du droit et l’actuelle norme pénale sur la discrimination est suffisante, pour autant que la police et les autorités d’enquête l’appliquent de façon conséquente, ce qui n’est hélas pas le cas s’agissant de concerts de groupes néo-nazis.

Le projet du fond national 40Plus voulait récolter des informations sur les conditions d’émergence, les formes de manifestation, la progression et les conséquences des activités de l’extrême droite en Suisse. Il s’agissait d’analyser le contexte social de l’extrémisme de droite et d’évaluer de certaines mesures de prévention. Ces études devaient apporter de nouvelles informations sur les origines, les manifestations et le contexte social de l’extrémisme de droite sur le plan communal, cantonal et fédéral. Cette mission a-t-elle été remplie ? Six des treize projets se concentraient sur les adolescents et les jeunes adultes. Ils avaient une visée psychologisante ou pédagogique. La plupart des études n’ont développé qu’indirectement le thème – comme les partis de droite et la politique de migration en Suisse, ou les représentations sociales populistes ou encore l’engagement de la droite en Suisse. Dès le départ, il était prévisible que le projet n’atteindrait pas son objectif de départ.

Voici quelques uns des résultats importants qui ont été communiqué fin 2006 ou 2007.

Environ un jeune sur dix est au moins une fois victime de violence d’extrême droite, ou se voit menacer par des jeunes de l’extrême droite . Les jeunes victimes de ces groupes découvrent que leur expérience est banalisée et que les actes de ces groupes sont tolérés, voire ignorés par les instances officielles du contrôle social (police, etc.). L’étude constate également qu’environ un dixième des jeunes sympathise avec la mouvance d’extrême droite.

Le fait de quitter ce milieu dépend généralement des motifs qui ont amené le jeune le rejoindre initialement, que ce soit par besoin compensatoire d’appartenance à une communauté ou pour des motifs idéologiques . Il suffit généralement pour y entrer de souscrire aux idées du groupe. Les structures rigides et l’importance accordée à la vie du groupe ne laissent guère de place à l’expression de sa personnalité, de sorte que le souhait de quitter le groupe peut apparaître. La famille ne semble jouer que peu de rôle dans cette désertion. Beaucoup de jeunes se distancent physiquement et socialement du milieu de l’extrême droite mais conservent des convictions anti-égalitaires, quand ils ne deviennent pas membres d’un parti néo-conservateur. L’étude part malheureusement d’une conception restrictive de la politique, désignant par ce terme la politique institutionnelle. Cela donne lieu à des appréciations peu réalistes qui qualifient les mouvements de « Freie Kameradschaften » (comme par exemple Blood et Honour ou les groupes Hammerskin) comme « apolitiques ». Cela contredit aussi bien les prétentions du groupe que les activités prouvées de ce réseau.

Les médias et la politique d’un côté et les extrémistes de l’autre s’instrumentalisent réciproquement, ce qui a conduit à une attention accrue portée à ce milieu . Les acteurs de cette mouvance se mettent en scène – par exemple par leur marche sur le Grütli – et profitant de la logique médiatique pour attirer l’attention. Dans les médias, on brise le tabou pour faire augmenter les ventes. Cette attention n’est toutefois que temporaire, ce qui rend plus difficile la vérification des mesures prises. L’étude part de l’idée,  peu prouvée, que les extrémistes de droite suisses recherchent la publicité médiatique parce qu’elle leur est utile. L’on ne pas non plus prouver que les informations parues dans les journaux sur l’extrême droite aient effectivement fait augmenter leurs ventes .
Le projet du Fond national a provoqué l’ire de ceux qui ont fait du racisme ou de l’exclusion leur fond de commerce politique. Un communiqué de l’UDC déclarait peu après la parution d’une l’étude le concernant, qu’il était discutable que le Fond national ait financé avec les deniers publics une recherche portant sur l’ « extrémisme de droite, ses origines et mesures de prévention ». Cette étude était entre autre parvenue au résultat peu surprenant que l’UDC ne représentaient pas un parti aussi homogène qu’il paraissait . Certes, la méfiance vis-à-vis de l’étranger et un fort sentiment d’appartenance nationale demeurent des thèmes rassembleurs, mais les membres du parti affichaient par ailleurs des opinions divergentes quant à l’idéologie néo-libérale prônée par le parti national.
Dans une motion parlementaire, le conseiller aux Etats UDC Maixmilian Reimann a critiqué sur le mode « la gauche est bien pire » le fait que l’on n’ait pas pris en compte l’intégralité du spectre de l’extrémisme en Suisse.   En particulier le fait que l’extrémisme violent a été étudié et documenté, entre autre parce qu’il existe des éléments extrémistes que l’on ne parvient plus à situer dans une vision traditionnelle du clivage gauche-droite. La réponse du Conseiller fédéral Pascal Couchepin laissait clairement entendre que la volonté des partis bourgeois de se confronter à la question de l’extrême droite en Suisse n’était plus dans les priorités du jour. Selon lui, il n’était pas nécessaire de poursuivre ce projet de recherche .

Autres groupuscules et projets

Sur internet, se trouvent toujours plus d’informations sur des groupes d’extrême droite, qui sont généralement locaux. Au printemps 2007 est apparue une « camaraderie d’Uri », dont les membres ont organisé à plusieurs reprises des attaques physiques contre des personnes mal vues . La page est plutôt anodine, elle affirme que la camaraderie défend le « peuple et la patrie ». Les membres de la camaraderie d’Uri » ont participé à la fête de la lutte de Sempach.

Au printemps 2007, un groupe nommé « Heimatschutz Rottal » a été brièvement présent sur internet. On ne lui connaît pas d’autres activités. L’appel lancé était le suivant : « Si tu veux poser des limites aux naturalisations en masse ! Si tu veux stopper la progression du multiculturalisme ! Si tu souhaite un meilleur avenir pour tes enfants ! Alors tu es ici à la bonne place !!! ». Dans un texte sur « la violence des étrangers », un auteur signant avec le pseudo « Wehrwolf » décrit les villes de Suisse comme des « petit New York ». Il continue : « C’est la raison pour laquelle nous devons nous opposer de toutes nos forces et avec tous nos moyens contre ces étrangers violents et ces hip-hoppeurs, pour mettre fin à la peur et à la terreur ». Le site a bientôt disparu d’internet.

Quant au responsable du site « Volksruf », il est aussi domicilié en Suisse centrale, probablement dans la région du Rigi à Schwyz. Ce site invite à « la communauté au lieu de l’individualisme.  Au futur au lieu de la globalisation ». Il met en scène d’une part images kitch de héros et agriculteurs, d’autre part des textes comme une interview du chansonnier Frank Rennicke ou un article à la mémoire des poseurs de bombes du sud Tirol, qui militaient pour la sécession du Tirol germanophone de l’Italie.

Freie Kameradschaften

Freie Nationale Kameradschaft Schweiz Germania FNK

L’emblème de la FNK fait référence au mythe du loup, selon lequel les hommes se transforment en loups assoiffés de sang durant la pleine lune.
Archives Internet Stutz septembre 2007

La Frei Nationale Kameradschaft Schweiz Germania FNK se comprend comme une camaraderie sans véritables membres, mais avec un public-cible stable. Elle ne se conçoit pas en terme d’organisation, mais comme participant à un mouvement plus général. Elle organise des « fêtes, des partys, des concerts et des soirées de chanson », parfois aussi des conférences. « Nous n’avons pas de comité, mais un petit noyau de personnes qui planifie et organise des événements divers ». La FNK appartient aux co-organisateurs de la manifestation contre les abus sexuels sur les enfants  et à la manifestation commémorative de la bataille de Morgarten .

Pour la peine de mort – contre les abus sexuels sur les enfants

Fin juillet 2007, un homme âgé a assassiné en Appenzel une jeune écolière. Début septembre, une organisation jusqu’ici inconnue, la Frei Nationale Kameradschaft Schweiz-Germania a appelé à Appenzel à une manifestation « contre les abus sexuels sur les enfants ». Les organisateurs ont recommandé de ne pas s’habiller de façon trop « extrême ». Dans les faits, des vestes d’aviateur couvertes d’emblèmes nazis et d’insignes racistes rendaient impossible la légitimité politique recherchée par les organisateurs. La demande d’autorisation a été déposée par une jeune femme habitant à Wiedlisbach dans le canton de Berne. La mobilisation s’est faite via internet. Les autorités appenzelloises compétentes avaient d’abord donné leur autorisation à la manifestation, puis l’avaient refusée après avoir pris connaissance du milieu politique que fréquentait la jeune femme qui avait déposé la demande. Malgré l’interdiction, environ 130 jeunes gens et jeunes filles se sont réunies, en particulier des skinheads de l’entourage de Blood and Honour . Après une brève discussion, la police laissent les manifestants marcher sur un bref tronçon de route aux abords de la localité.

Les manifestations et campagnes contre les violeurs d’enfants sont appréciées des milieux d’extrême droite, car elles leur permet d’obtenir une forme d’acceptation sociale et part de l’idée que la réintroduction la peine de mort rencontre peu de résistance dans ce domaine.  En mars 2003, des extrémistes de droite avaient manifesté par surprise à Soleure. Le négationniste Bernhard Schaub avait tenu un discours et distribué des tracts.

Pour exemple, la section de l’Oberland bernois du PNOS, avait critiqué la justice qui ne trouvait pas nécessaire de condamner les abuseurs d’enfants et l’usage de la pornographie enfantine par la condamnation à vie – « voire même la peine de mort ». Sur la page de l’organisation, quelqu’un écrit d’ailleurs sans se gêner : « Un arbre, une corde, un violeur d’enfant est pendu à la nuque ». Cet appel a reçu d’autres soutiens dans le milieu des extrémistes. Un groupe dans la mouvance du PNOS, le Kampfbund Nationaler Aktivisten (KNA), a par exemple protesté contre « le développement regrettable de notre société décadente ». Dans le forum suisse du réseau néo-nazi Blood and Honour diverses personnes ont relaté leur voyage à Appenzell .

Vente de livres et de musique par correspondance

Jusqu’à ces récentes années, les extrémistes de droite suisses devaient aller se fournir à l’étranger, en particulier en Allemagne, pour acheter des livres et des enregistrements. En 2004, Sacha Kunz, l’ancien président du PNOS avait mis sur pied une structure de distribution. Le label “White Revolution” devait être un label actif dans la distribution de disques. Selon les déclarations faites sur le site Internet, “White Revolution” se voulait un label suisse dont l’objectif était “de participer à la scène musicale suisse du courant nationaliste”. Le studio d’enregistrement “Swastika Records”, actif dans la production professionnelle de musique était rattaché à ce label. En automne 2005, Sacha Kunz a rebaptisé sa société du nom plus anodin de Helvetia Versand, puis plus tard Utgard Versand. L’offre n’a pas changé est restée accessible via Internet pendant quelque temps, jusqu’à ce que la police cantonale argovienne perquisitionne au domicile de Kunz dans le cadre d’une procédure pour violation de la norme pénale contre la discrimination raciale. La clientèle de la maison de vente s’était étoffée, comme l’a signalé l’association Antifa Berne à la mi-août 2005, lorsqu’on lui a fait parvenir la base de donnée avec plus de 150 noms de clients .
Durant l’été 2006, Kunz a suspendu son activité après quelques déboires financiers. En hiver 2006, un tribunal allemand l’a condamné à une amende et a également ordonné la confiscation des enregistrements déjà produits . Au quotidien “Blick” Kunz a déclaré en septembre 2006: “Je me retire” . L’avenir dira si cette information correspond à la réalité. Sacha Kunz était l’un des partenaires du duo “Die Eidgenossen” qui ne s’est pas produit en 2007. Conclusion: les extrémistes de droite en Suisse doivent à nouveau importer leur CD’s de musique depuis l’étranger, lorsqu’ils ne les achètent pas au stands lors des concerts.

Librairie virtuelle Neue Zeitwende

La librairie par correspondance Neue Zeitwende diffuse selon ses dires « des livres consacrés à divers thèmes, comme l’histoire, la culture et les mœurs, la politique et d’autres sujets. » En réalité, elle diffuse des livres sur les sociétés secrètes, de la littérature à la gloire des SS ainsi que des publications d’auteurs d’extrême droite comme Jürgen Schwab ou Peter Dehoust.  L’offre ne s’est toutefois guère développée au cours de l’année écoulée. L’envoi se fait via case postale à Aefligen (près de Kirchberg BE) et la personne qui s’en occupe est Adrian Segessenmann.

« Blutschutz » – T-shirts, pins et accessoires

Un signe d’émergence et de consolidation d’une subculture est l’offre en matière de produits et d’accessoires exprimant un style de vie, qu’il s’agisse de livres (librairie Neue Zeitwende) ou de vêtements. Durant l’été 2007, un extrémiste de droite jusqu’ici inconnu a ouvert un site qui vend des T-shirts affublés de slogans et propose également l’impression d’affichettes. Il semble que son rayon d’activité se situe dans la région Aarau/Zurich.

Groupes de musique

Dans toutes les subcultures de jeunes, la musique joue un rôle d’identification et de valorisation, d’une part en tant que vecteur d’une certaine joie de vivre et, d’autre part, en tant que moyen de diffusion de messages politiques.  Les concerts servent à cimenter le groupe et à diffuser des messages politiques, surtout lorsqu’ils sont organisés par des skinheads néo-nazis, car on y trouve généralement des stands qui proposent aussi bien des enregistrements que des livres/brochures ainsi que d’autres articles typiques du mouvement. Jusqu’à la publication de l’arrêt du Tribunal fédéral concernant la norme pénale antiraciste et la notion d’événement “public” , la police et le juge d’instruction considéraient les concerts skinheads néonazis comme des manifestations privées, même s’ils réunissaient plus de mille personnes et si l’annonce du concert était accessible aux journalistes.
Plusieurs groupes de musique à tendance extrémiste sont apparus au cours des dernières années. Il y a plus de dix ans déjà naissait le groupe bâlois “Sturmtruppen Skinhead”, plus tard le groupe Hammerskin de Suisse orientale “Erbarmungslos”. Emanant également de la mouvance Hammerskin, les musiciens du groupe lucernois “Dissens”.
En 2007, il y avait quatre groupes officiellement actifs, le groupe « Amok », « The Bombers », « Dissens » et « Indiziert », le plus connu d’entre eux.

Amok

Le groupe « Amok » est composé de quatre membres. En septembre 2005, le groupe s’était produit lors d’un concert Blood and Honour à Brique. C’est là qu’il a chanté une chanson antisémite extrêmement violente, « das Blutlied » . Deux ans après le concert, l’enquête n’est toujours pas terminée. Les membres de ce groupe n’ont jusqu’ici pas donné d’interview, pas même dans des publications de ce milieu.

Le groupe Amok, qui participe de la même subculture skinhead tendance nazie que Blood und Honour, a sorti en 2007 un CD intitulé « Verbotene Wahrheit » (vérité interdite) où il en appelle au meurtre des noirs et fait entrevoir à l’auteur même de cette chronologie une mort violente . Dans d’autres chansons, les musiciens nient également l’holocauste et font l’apologie du meurtre des noirs.

Noël blanc sans Père Noël? Annonce pour un concert skinhead avec le groupe tessinois « The Bombers »
Image internet/Archiv Stutz

Pour la première fois, un groupe d’extrême droite tessinois est également actif dans la région de Lugano. Le groupe de quatre personnes s’est produit pour la première fois en automne 2006 lors d’un grand festival skinhead dans les environs de Venise. La même année il avait sorti son propre CD-démo. En 2007 le groupe a sorti un CD intitulé « Nessuna Pietà » (sans aucune pitié). Le groupe devait se produire début septembre 2007 à Jena lors d’une « fête des peuples », mais il n’est pas parvenu à se rendre sur place. Une interview était présente pendant peu de temps sur un site de l’extrême droite Suisse alémanique, puis a disparu. Dans cette dernière, le porte-parole du groupe réaffirmait l’attachement du groupe à l’idéologie d’extrême droite.

« Dissens »

La section suisse des Hammerskinheads fondée en 1990/1991 fait partie des plus anciennes de Suisse. Le chanteur du groupe Dissens Gary Albisser en est l’un des fondateurs.
Source : internet/archives Stutz automen 2007

Début novembre 2007 a eu lieu aux alentours de Milan un concert de Jubilé « 20 années de Hammerskin Europe ». Y participaient une demi-douzaine de groupes de musique, dont le groupe suisse « Dissens ». Pendant un certain temps, le groupe ne s’est ensuite plus fait entendre. Dans un forum internet, il était question de « problèmes de fonctionnement » du groupe, aujourd’hui dépassés. Le groupe « Dissens » de la région de Lucerne appartient à la mouvance Hammerskin. Le chanteur Gary Carlo Albisser, aujourd’hui âgé de 37 ans, faisait partie dans les années 90 des fondateurs de la section suisse des Hammerskinheads et avait participé à l’attaque par surprise d’une manifestation anti-fasciste début novembre 1995 à Hochdorf .

« Dissens » n’a jusqu’ici pas sorti de CD. Dans une interview , ils annonçaient en été 2006 la production d’un nouveau CD, mais pour l’instant l’on en a pas entendu parler.

« Indiziert »

Le nouveau CD du groupe Indiziert contient des chansons qui glorifie leur camp et insulte les opposants.

Peu de jours avant Noël 2006, au milieu de la vieille ville de Burgdorf, le groupe « Indiziert » invite à un concert de fin d’année. Il est parvenu à louer une salle sous un prétexte quelconque et environ 200 personnes sont présentes . Cette apparition est une pure  provocation, car 18 mois auparavant, le groupe s’était produit en ville et avait suscité une énergique réaction de la part de la police. « Indiziert » est actuellement la formation musicale la plus connue de ce milieu en Suisse et elle s’est déjà  produite à plusieurs reprises à l’étranger. Selon sa page internet, le groupe aurait donné cette année une demi-douzaine de concerts.

« Indiziert » a entre temps sorti un CD en été 2007 qui porte le titre « Le dernier bastion ». Ce CD contient des chansons qui invoquent la force de leur camp et insulte ses adversaires politiques. Voici quelques extraits : « Résistance nationale/contre cet état multiculturel et la mafia rouge/ contre les politiciens corrompus et toute la clique communiste/ qui depuis toujours combat les nationalistes, mais leur plan ne prend pas/ les nationalistes sont les combattants de la liberté et nous nous accommodons même de la mort.

Le groupe rock “Indiziert” se compose des frères Alex et Cedric Rohrbach, de Dominic Lüthard et de Benjamin Lingg. Lüthard s’était porté candidat sur la liste du PNOS ainsi qu’au législatif de la commune de Roggwil mais n’a pas été élu. Depuis fin 2007, il est président de la section du PNOS à Langenthal.

Diffusion de CD’s dans les préaux par le PNOS Oberland bernois

Lors de sa campagne électorale en 2005, le Nationaldemokratische Partei Deutschland (NPD) avait distribué des CDs gratis dans des écoles. Les CD en question contenait des chansons de divers groupes de cette mouvance. Par la suite, des extrémistes de droite suisse ont également répandu ce CD de propagande à divers endroits . Parmi ces derniers figuraient à l’époque les représentants du « Bundes Oberland » , qui a cessé ses activités après la création de la section Oberland bernois du PNOS.

Vision du monde de l’extrémisme de droite : l’Oberland bernois colonisé par le capital américain, les Juifs et McDonald.

Mi-octobre 2007 des inconnus ont distribué un CD produit pour la Suisse dans les préaux de la région de l’Oberland bernois . Fin décembre, la section du PNOS de cette région a revendiqué cette action. Le CD contenait sept chansons du groupe « Indiziert », les autres provenaient de groupes allemands connus dans le milieu. Les membres de la section prétendaient sur leur page internet que les textes « avaient été vérifiés par la police ». Dans les faits, beaucoup de textes se situent dans une zone grise quant ils ne dépassent pas franchement les limites. Cela vaut en particulier pour le titre d’un groupe allemand connu « Stahlgewitter » (tempête d’acier) intitulé « ZOG II ». ZOG est l’abréviation de Zionist Occupation Government (gouvernement d’occupation sioniste). Le morceau commence avec les paroles suivantes : – « ZOG, le pouvoir des anti-humains, le pouvoir secret qui dirige le monde. Combattez l’ennemi éternel, avant que le dernier peuple libre ne crève ».

Organisations politiques

Ces dernières années, les extrémistes de droite ont aussi tenté de constituer des partis politiques dans le but de participer aux élections. La plupart de ces projets on généralement fait long feu, à l’instar du Parti national suisse (NPS) de David Mulas. Le parti nationaliste suisse (PNOS) constitue la seule exception et s’est doté entre temps de structures solides. A Bâle, Eric Weber s’est présenté comme unique candidat de son “Action populaire contre trop d’étrangers et de demandeurs d’asiles dans notre patrie” en participant au deuxième tour des élections pour le conseil exécutif de la ville. Largement battu, Weber a obtenu un résultat de 1,46%, soit plus du double de parti des Démocrates Suisses (0,68%). Weber a une longue carrière dans les milieux d’extrême droite. En 1986, il a été élu au Grand conseil sur la liste de l’Action nationale, d’où il est bientôt ressorti en raison de ses comportements désagréables. Après son retrait du Grand conseil, il a déménagé pour plusieurs années en Allemagne, où il a cherché à travailler comme journaliste. Au début des années 90 il avait été jugé pour irrégularités lors des élections . En 2003, il a participé aux élections nationales, en 2004 aux élections du Grand-conseil de Bâle-ville, toujours sur la liste des Démocrates Suisses (DS).

Le parti nationaliste suisse (PNOS)

Mi-octobre 2007, le district d’Aarau condamne cinq membres du comité du PNOS à une amende, parce que le programme de leur parti contrevient à la norme pénale sur la discrimination raciale. Il s’agit de la seconde condamnation. En été 2006, les représentants du PNOS avaient accepté l’amende et publié un nouveau programme politique, dans lequel les références au parti allemand de la NSDAP avaient été supprimées. Les positions politiques très proche des nazis n’en demeurent pas moins. En 2007, le PNOS a soutenu à diverses reprises des négationnistes condamnés, par exemple  Ernst Zündel. Début 2007, les thèses du négationniste Jürgen Graf paraissaient dans le journal du PNOS « Zeitgeist ». A l’automne, le PNOS a fait une tentative infructueuse pour soutenir l’initiative populaire lancée par les Démocrates Suisses pour l’abrogation de la norme pénale sur la discrimination raciale en créant son propre comité . Le PNOS ne voulait pas « aller récolter des signatures dans la rue » pour le compte des Démocrates Suisses a déclaré le porte-parole du parti Mario Friso. Des semaines plus tard, le PNOS a envoyé des lettres à des représentants des Démocrates Suisses les incitant « à quitter le parti faiblard des Démocrates Suisses pour rejoindre le PNOS. Les Démocrates Suisses ont récemment perdu toute légitimation politique depuis la non-réélection de Bernhard Hess. Avec leurs attaques bâclées envers le PNOS les DS ont prouvé leur attitude de petit chien et leur soumission au consensus de l’establishment. Les Démocrates Suisses aiment bien afficher leur patriotisme, mais en réalité, ils ne valent pas mieux que les autres partis du système qui se prosternent devant le capital et espèrent trouver une place autour de l’écuelle » .

Le PNOS combine dans son discours politique la critique du capitalisme et des propositions racistes, dont le but est un « racisme confédéral ». La critique du capitalisme est pour le moins radicale, mais reprend également les arguments du commerce de détail comme dans une affichette du PNOS de Küssnacht am Rigi : « Le commerce de proximité est sacrifié par la politique actuelle à la pression internationale sur les prix. ». La section invite d’une part à « préférer les commerces locaux aux grosses entreprises internationales », d’autre part à « refuser le fantasme de la société multiculturelle et rapatrier la main d’œuvre bon marché ». En d’autre termes : « Dehors les étrangers pauvres » .

Le PNOS a été créé en 2000, parmi ses fondateurs l’on trouve des Skinheads du mouvement Blood and Honour. Le premier président était Sacha Kunz. Il fut remplacé au printemps 2003 par Jonas Gysin. Ce dernier s’est retiré en août 2005. Fin 2007, le parti était dirigé par un comité de quatre membres : Denise Friedrich, André Gauch, Jonathan Leiggener et Roland Renggli. Parmi les membres les plus actifs l’on comptait en 2007 Michael Haldimann de l’Oberland bernois, Mario Friso et Jordi De Kroon, Dominic Lüthard de Langenthal, Timotheus Winzenried, Raphael Würgler et Tobias Hirschi, Michael Vonäsch et Dani Wütrich de Willisau, ainsi que David Schnurrenberger de Küssnacht am Rigi.
A deux reprises, les représentants du PNOS ont été invités au Portugal. A gauche, Mario Friso avec un représentant du Kampfbundes Deustscher Sozialisten (KDS).

A fin 2007, le parti était actif dans la région de Langenthal, dans l’Oberland bernois, dans le canton de Fribourg, à Willisau et à Küssnacht am Rigi SZ. La section cantonale de Soleure a été dissoute en automne 2007. Des membres du Nationaldemokratischen Partei Deutschland (NPD) étaient présents à diverses reprises lors des manifestations du PNOS, et inversement, des membres du PNOS se sont rendus au Portugal et en Allemagne.

Le porte-parole du PNOS, Andreas Meier, lors de la fête des peuples à Jena, septembre 2007
Source : Internet, archives Stutz

Diverses organisations comme  la Helvetische Jugend et le Kampfbund Nationaler Aktivistinnen KNA s’activent à la périphérie du PNOS.

Helvetische Jugend

La Helvetische Jugend a été créée début juillet 2004 dans la région d’Oberaargau (Langenthal et région) dans le canton de Berne. Parmi ses buts figurent sur sa page internet “la fin du multiculturalisme”, grâce entre autre à “l’expulsion d’étrangers dangereux et la limitation du nombre d’étrangers” sur le territoire suisse. Plus loin il est question de “l’internement pour les demandeurs d’asile” et d’une “meilleure éducation plus neutre dans les écoles suisses » (où il faudrait cesser toute propagande en faveur de Lénine et de Staline et séparer les élèves parlant allemand de ceux qui ne le parlent pas. Enfin, il faudrait mettre un terme à la « désinformation gauchiste et à la terreur des médias, car il faut plus de journalistes neutres ».
En 2007, des membres de la Helvetische Jugend ont participé à la marche des extrémistes de droite lors de la fête fédérale de lutte de Sempach  et ont tenté d’atteindre la prairie du Grütli qui était barricadée avec des bateaux gonflables. Ils ont également participé à une démonstration contre la violence des étrangers à Worb près de Berne . Les participants portaient des T-shirts avec l’inscription : « La résistance ne se laisse pas interdire ».
Le groupe dispose d’une présence sporadique sur le net. Ces dernières années, outre les informations sur les activités du groupe, figuraient des textes hostiles à l’islam, et des incitations à rejoindre la marche au Grütli.

Kampfbund Nationaler Aktivistinnen

L’organisatrice du Kampfbund Nationaler Aktivistinnen (KNA) se plaint du fait que dans la mouvance nationaliste, les femmes ont toujours occupé un rôle subalterne et étaient traitées « comme des êtres inférieurs par les hommes ». En réalité, les leaders du PNOS ont plutôt vu d’un mauvais œil la création de ce groupement. « Je pense qu’il est fondamentalement encore trop tôt pour intégrer les femmes de cette façon. Elles ne sont certainement pas nombreuses, alors toute une histoire pour une dizaine de poulettes? Nous avons des choses plus importantes à faire, du moins c’est mon avis » . Le discours du KNA n’échappe pas à une certaine contradiction.  D’une part, il souhaite des femmes indépendantes qui participent à la « lutte nationale contre l’asservissement des peuples par le capitalisme », mais qui continuent, selon une vision traditionnelle, à occuper leur rôle de femmes et de mères. Une famille intacte est pour le KNA « le plus grand des bonheurs ». Et d’une manière générale, « les femmes sont supérieures aux hommes dans le domaine de l’empathie, de la compréhension, de la communication et de la responsabilité, l’ordre et l’endurance ». Le KNA déclare que le féminisme est « l’ennemi des femmes », et « de loin dépassé ». « Nous devons encourager une nouvelle féminité émancipée et arrêter l’extinction de la race. »
Fin juillet 2007, environ 40 personnes se sont retrouvées pour l’anniversaire du Kampfbund Nationaler Aktivistinnen dans un refuge de forêt . L’unique porte-parole de ce groupe a été pour l’instant Denise Friedrich, membre du comité du PNOS. Début 2008, le KNA a déclaré qu’il voulait « élargir le cercle des activistes, pour atteindre si possible un large public. ». Le KNA prend modèle sur d’autres organisations en Allemagne comme la Gemeinschaft Deutscher Frauen, le Ring Nationaler Frauen ou le Mädchenbund Thüringen.

Heimatbewegung

Les membres de la Heimatbewegung ont également participé à la fête de la lutte de Sempach en 2007, reconnaissables à leur pin. Sinon, la Heimatbewegung – créée en 2004-2005 et joignable via une boîte postale à Dübendorf – ne s’est pas manifestée publiquement en 2007. Le nombre d’adhérents est incertain, et l’on ignore tout de ses activités internes. La Heimatbewegung dispose d’une présence sporadique sur internet, traitant généralement du thème des étrangers en relation avec les actions politiques du camp des nationalistes conservateurs.
La “Heimatbewegung” vise la dissolution de la Suisse quadrilingue, car elle défend en priorité les intérêts et la survie de la “population alémanique”, à savoir “pour un Etat populaire représentant les limites actuelles de la Suisse alémanique”. Sinon, les points principaux du programme sont – comme c’est généralement le cas pour les groupements d’extrême droite – le soutien à la Suisse rurale, le rétablissement de la peine de mort, l’abolition du droit d’asile, le frein total à l’immigration, l’interdiction de toute forme d’intégration des étranger ainsi que l’arrêt complet des procédures de naturalisation.

Les Identitaires

Dans les pays d’Europe francophone une nouvelle mouvance s’est développée au sein du camp d’extrême droite qui se nomme les “Identitaires” et en appelle à une “identité européenne et blanche” tout en se positionnant contre l’immigration en provenance des autres continents. En France, un groupuscule « Les Identitaires » s’est formé et s’est fait remarquer par des actions spectaculaires. En Suisse, il existe deux groupements différents, d’un côté les Identitaires de Romandie, de l’autre les Jeunesses Identitaires de Genève. On ne sait pas combien de membres comptent ces deux organisations, ni quels sont ses leaders. Chacun de ces groupes bénéficie d’une présence sur internet.

En 2007, ce sont avant tout les Jeunesses Identitaires de Genève qui ont été les plus actives. Début octobre 2007, le mouvement a organisé une première manifestation publique dirigée contre « le racisme anti-blanc ». Selon un compte-rendu dans la Tribune de Genève , une cinquantaine de personnes y ont participé, surtout des jeunes gens entre 16 et 25 ans. Sur sa page internet, la section annonce qu’elle collecte des signatures pour l’initiative sur l’interdiction des minarets et vend des livres et des brochures. Arnaud Borella était le premier orateur lors de la manifestation pro-serbe « Solidarité Kosovo ».
Les Jeunesses Identitaires de Genève sont apparues sur la scène publique pour la première fois en 2006. En été 2006, ils ont distribués dans un quartier genevois un petit pamphlet stigmatisant la « haine contre les Suisses » .

Leur but est la défense des Européens de race blanche.  Face aux dangers de la globalisation, de l’immigration massive, et à la dissolution de « l’identité suisse et européenne » ils ne voient qu’une issue pour la jeunesse romande: agir ou subir. Et tout cela « pour la Romandie, pour la Suisse et pour l’Europe ». En 2007, est parue le troisième numéro des “Cahiers identitaires romands”, un cahier fabriqué de façon primitive.

Portails d’information

En Suisse, la mouvance d’extrême droite ne dispose que de peu de médias, en particulier des médias écrits. Cependant il existe depuis plusieurs années des portails d’information comme Freie Stimme (respectivement Altermedia Schweiz), Altermedia Suisse et Novopress Suisse. En 2006, ces sites n’étaient alimentés plus que de manière irrégulière. Le responsable du portail Freie Stimme/Altermedia Schweiz a subi une perquisition à son domicile en automne 2005, et depuis fin avril 2007, le site a cessé d’être alimenté. Altermedia Suisse est toutefois encore actif mais n’offre que rarement des informations de ou sur la Suisse. Novopress Suisse informe en revanche de façon continue et diffuse avant tout des informations de l’agenda politique du camp nationaliste conservateur. Actif également est le site Patriot, dont les informations et le forum de discussion se distinguent par un nationalisme militant.

Freie Stimme – fermé pour cause de condamnation

Depuis mi-avril 2007, il ne reste sur la page internet « Altermedia Schweiz : Freie Stimme » qu’une seule indication, à savoir qu’un article sur le monument commémoratif de l’holocauste à Berlin y avait été publié, mais que « ce genre de propos étant passibles de condamnation en Suisse, le texte a dû être retiré ». En réalité, Freie Stimme avait publié le 25 mai 2005 un rapport sur l’inauguration du monument commémoratif de Berlin. L’auteur pose entre autre la question de savoir « ce qu’il adviendra de ces 2711 stèles de béton, lorsqu’un autre vent soufflera de nouveau à Berlin et dans le reste de l’Europe. Et comme la liberté d’opinion existe encore en 2005, la rédaction formule sans engagement la proposition suivante : que ceux qui étaient responsables de ce monument le réduisent en poussière à l’aide de marteaux pour qu’il n’en reste rien. La poussière du passé de la plus grande défaite de l’Allemagne et de l’Europe. »  Les enquêtes ont conduit en automne 2005 à deux perquisitions. Début mars 2007, le tribunal de district de Laufenburg a condamné le jeune Markus G, 24 ans, qui depuis à déménagé dans le canton de Soleure, à une amende de 1’000 francs et une peine pécuniaire de 50 jours-amende de 90 francs pour infraction à la norme pénale sur la discrimination raciale. Il n’est pas clair si la deuxième perquisition a également conduit à une condamnation. Le tribunal de district a également exigé la destruction du matériel de propagande choisi – dont de nombreux CDs, diverses affichette, magazines politiques, invitations à des fêtes de récoltes ainsi que des cahier du Nationale Front et de Savitri Devi, une représentante de l’ésotérisme hitlérien. Devi conteste l’existence des chambres à gaz pour l’extermination des juifs d’Europe et taxe les propos des survivants des camps de concentration de « mensonges juifs » . Le négationniste suisse Bernhard Schaub avait publié en 2005 un cahier spécial de WotansWort .
Dans un courriel à un membre du PNOS, Markus G. présente sa vision du monde clairement national-socialiste : « Si quelqu’un a mérité un monument dans la capitale allemande, c’est bien le plus grand des Allemands de tous les temps avec ses courageux combattants, le courageux peuple allemand et ses soldats européens alliés, qui jusqu’au bout se sont battus contre les provocations de l’ennemi mondial » . Markus G., dont les actions n’ont jusqu’ici pas attiré l’attention, déclare également dans le même courriel qu’il avait accompli sur l’ordinateur saisi « de nombreux travaux de conception (cahiers, livres, tracts, pages internet) pour divers représentants et organisations du mouvement nationaliste .

Dès l’été 2002, « Freie Stimme » publiait régulièrement des commentaires sur l’actualité dans une perspective pronazie et raciste, parfois avec des connotations antisémites, parfois avec des insinuations qui laissent transparaître une certaine sympathie pour les négationnistes de l’holocauste. Alors que « Freie Stimme » commentait généralement les activités du camp national-conservateur sur un ton bienveillant, le conseiller fédéral Christoph Blocher a au contraire été critiqué au sujet de sa politique de migration. Tout comme son parti l’UDC, il a été accusé de jouer un « double jeu », car il aurait « répété à maintes reprises que la Suisse avait besoin des étrangers et que son économie était tributaire de l’immigration ». En d’autres termes, Freie Stimme estime que la politique des étrangers menée par Blocher et l’UDC manque de cohérence.

Division Schweiz

C’est par la musique et de courtes séquences vidéo que «Division Schweiz » veut apporter son message politique. Derrière ce nom se dissimule une seule personne habitant la Suisse orientale, qui travaille probablement avec peu de collaborateurs. Division Schweiz s’est donné pour mission de créer des « films nationaux indépendants » pour les montrer à des sympathisants pour leur faire comprendre que « nous ne sommes pas seuls et que nous luttons au-delà simplement de notre nation. Nous sommes beaucoup plus nombreux que nous ne le pensons et contrairement à ce qu’ils prétendent (nos ennemis) Le projet a commencé par une vidéo sur une adresse donnée à Budapest, où les extrémistes de droite se réunissent annuellement en février en hommage à la Waffen-SS. Depuis, de nombreux comptes-rendus de manifestations d’extrémistes de droite allemands sont parus sur internet, auxquels s’ajoute un documentaire éclairant sur l’adjoint d’Hitler, Rudolf Hess. Depuis l’automne 2007, Division Schweiz se consacre à créer une filmographie sur les cantons suisses. Les premiers portraits offrent le charme désuet des films sur de la défense spirituelle des années 1930.

Activités politico-culturelles

Divers activistes et organisations se réclament d’une idéologie d’extrême droite mais ne participent pas forcément à la politique institutionnelle et ne se présentent pas aux élections. Ils s’occupent de promouvoir leur idéologie par un travail de formation et de réseautage. On peut citer ainsi le cercle Avalon ou Gaston-Armand Amaudruz avec son journal le “Courrier du Continent”, mais aussi le couple Paschoud avec son journal “Le Pamphlet”. Le Cercle Proudhon était également à nouveau actif en 2007. Début novembre, il a organisé une conférence avec la participation de l’avocat et négationniste français Eric Delcroix.  Le Cercle Proudhon, dont l’un des principaux représentants est l’avocat genevois Pascal Junod, a été créé en 1984 et a organisé diverses conférences ayant attiré un large public à l’Université de Genève. A partir de 1990, le cercle est demeuré longtemps inactif . En avril 2001, il a organisé une conférence de l’extrémiste de droite français Guillaume Faye . On ne sait pas si le cercle continue à être patronné par Pascal Junod. Après avoir été actif pendant un certain temps à l’UDC, ce dernier est entré en tant que représentant de la branche sécessionniste de l’UDC, le Mouvement Citoyen Genvois (MCG) au sein de la Commission cantonale des étrangers .

Le cercle Avalon

Le cercle Avalon est longtemps resté secret, de sorte que ses activités sont peu connues du grand public. Toutefois en 2007, le cercle Avalon a informé que son président (« primus ») de longue date Roger Wüthrich, se retirait pour des motifs personnels.  Son remplaçant est Adrian Segessenmann, habitant de Kirchberg près de Burgdorf. D’après les informations de la page internet du cercle Avalon, on peut déduire qu’il a organisé au moins deux manifestations. Début février, c’est Richard Melisch qui a donné une conférence , et plus tard Hajo Hermann, ancien pilote de la Wehrmacht.
Le nouveau primus de la société Avalon, Adrian Segessenmann, né en 1979, est un activiste de longue date dans les milieux d’extrême droite. En 1995, à l’âge de seize ans, il avait déjà participé avec un groupe de Skinheads, à une agression lors d’un « Festival pour la compréhension entre les peuples » à Hochdorf. Au printemps 1999, il avait organisé avec Roger Wüthrich une conférence sur les Waffen-SS, qui avait amené le Tribunal fédéral à redéfinir le « caractère public de l’acte » relatif à la norme pénale sur la discrimination raciale. Est public tout ce qui ne se déroule pas dans un cadre privé. Segessenmann gère aujourd’hui la librairie virtuelle « Neue Zeitenwende », qui depuis environ deux ans diffuse des livres qui défendent la Waffen-SS, jusqu’aux cahiers « Landser » qui réécrivent l’histoire de la deuxième guerre mondiale du point de vue de la Wehrmacht. Mi-juillet 2006, il a inscrit au registre du commerce la société en nom simple Thor Steinar, dont le but est la vente au sympathisants du mouvement néo-nazi de la marque de vêtement Thor Steinar. Cette activité a dans l’intervalle été suspendue et la société retirée du registre du commerce.

Le Cercle Avalon a été créé en 1990 par Roger Wüthrich, précédemment dirigeant de la “Jeunesse Viking suisse” et par Andreas Gossweiler, actif à l’époque dans divers mouvements d’extrême droite.  A ces rencontres participent, à côté de représentants connus, comme l’islamiste Ahmed Huber et Roger Wüthrich d’anciens fascistes ainsi que de jeunes skinheads pro-nazis.

Recht + Freiheit (Droit et Liberté), Ernst Indlekofer

Début 2007, Recht + Freiheit se targue dans son journal de constater une „croissance de ses abonnés“ depuis le mois de décembre 2006. Quoi qu’il en soit, les membres sont sollicités pour « renforcer cette tendance »  par leurs recommandations personnelles. Indlekofer utilise parfois même la manière forte, selon un article du Beobarchter. Il a menacé « les anciens donateurs de son association Presseclub Schweiz de poursuites judiciaires s’ils ne payaient pas à nouveau. » .

Officiellement, Recht+Freiheit est publié par un certain Presseclub Schweiz, mais de facto c’est bien le bâlois Ernst Indlekofer,  désormais âgé de presque septante ans, qui est principalement responsable de ce cahier d’une dizaine de pages par édition. En 2007, il a publié quatre doubles éditions. Parmi les contributeurs suisses aux éditions 2007 figurent Max Disteli d’Olten (décédé dans l’intervalle) et Gaston Armand Amaudruz. Cette année encore, l’éditeur a rassemblé les membres de son association lors d’une assemblée générale le 29 septembre 2007. Comme les années précédentes, les membres devaient au préalable demander leur « carte d’entrée personnelle » . L’assemblée générale n’était donc pas publique.

En termes de contenu, il n’y a pas beaucoup de changement dans les cahiers d’Indlekofer. Il s’en prend à la norme pénale sur la discrimination raciale, sympathise avec les négationnistes, plusieurs articles documentent la fameuse conférence de Téhéran de décembre 2006 « Review of the Holocaust : Global Vision ». En outre, il a publié l’allocution antisioniste du rabin Moishe Arye Friedman . Indlekofer diffuse en outre un mélange choisi de petits textes racistes, antisémites, néonazis et de théories de la conspiration. Un seul exemple : « La haute finance veut l’Union européenne, son moteur est la BRD vassale des Etats-Unis. Ils veulent mettre en œuvre le mélange des peuples et la gouvernance mondiale, à l’exception d’Israël. Si notre peuple savait la vérité, le lobby de l’immigration serait depuis longtemps supprimé et le stupide discours sur la tolérance balayé. »
En août 1998, les autorités pénales de Bâle-ville ont ouvert une procédure pour enfreinte à la norme pénale sur la discrimination raciale. Neuf années plus tard, l’affaire n’est toujours pas close. Fin mars 2006, le tribunal pénal a suspendu la procédure, parce que les autorités d’enquête auraient enfreint le principe de la célérité.
La procureure du canton a recouru contre cette décision, cependant le tribunal n’a envoyé les considérants du jugement seulement fin novembre 2007.

Gaston Armand Amaudruz et le “Courrier du Continent”

Le vieux fasciste Gaston Armand Amaudrz, a été toute sa vie un activiste en faveur du national-socialisme et du racisme . Aujourd’hui âgé de 86 ans, il continue à publier régulièrement son petit journal de 12 pages hectographiées, le “Courrier du Continent”. Le contenu est identique depuis des années. Dans la partie “bloc-notes”, Amaudruz tire des citations des journaux qu’il assortit de commentaires sardoniques. Mais dans cette rubrique, il donne également des informations (y compris adresses) de nouvelles publications de l’extrême droite et de ce fait contribue à la mise en réseau de ce milieu. Puis viennent des rubriques habituelles sur la “criminalité” ou sur la “Lois-Baillon” (c’est ainsi qu’Amaudruz désigne la norme pénale suisse sur la discrimination raciale). Viennent s’ajouter des textes de ses collaborateurs comme Guiseppe Patanè, Yann Woltering, Martine Boimond. En 2006, le négationniste Robert Faurission consacre plusieurs articles aux soi-disant vingt victoires des négationnistes . La dernière page est généralement consacrée à un article où Amaudruz expose ses thèses racistes, antisémites et négationnistes. Ces propos ont valu à Amaudruz deux séjours de trois mois en détention voici quelques années.

Le “Courrier du Continent” est paru pour la première fois en 1946 et est rédigé et publié depuis une cinquantaine d’années par le fasciste lausannois Gaston-Armand Amaudruz. Pendant des décennies, ce cahier était l’organe officiel de NOE, une petite organisation raciste dont Amaudruz était l’un des principaux animateurs. Le pamphlet continue à être publié aujourd’hui à quelques centaines d’exemplaires.

Le Pamphlet de la maison Paschoud

En décembre 2007, Mariette Paschoud annonçait dans sa revue Le Pamphlet, qu’elle publie en collaboration avec son époux Claude, qu’étant donné qu’elle était désormais à la retraite, elle ne risquait plus de perdre son emploi. Cela lui donnait donc plus de liberté dans le choix de ses sujets . Elle annonce l’ouverture d’une rubrique « Les nouvelles aventures … », destinée à relayer les informations sur le révisionnisme, qui pourrait intéresser une partie du lectorat. Dans les faits, Mariette Paschoud avait déjà évoqué dans la précédente édition le procès contre le négationniste canadien Ernst Zündel. Selon elle, « tout cela n’est pas honorable et même les adversaires du révisionnisme par ailleurs sensés et mesurés me donneront raison sur ce point ».  Elle cite également une lettre de Zündel, dans laquelle il parle d’amis et de connaissances communes. Elle se plaint que l’ASIN ait par le passé exclu des négationnistes. Elle salue la proposition de Blocher de modifier la norme pénale sur la discrimination raciale : « Il a fallu que Monsieur Blocher goûte aux joies du 261bis pour que les choses commencent à changer. Espérons qu’il n’est pas trop tard   ».

Le co-éditeur, Claude Paschoud, se risque à un commentaire à connotation antisémite, lorsqu’il prétend que la norme pénale ne protège que la mémoire d’un seul génocide qui « celui en particulier qui fonde encore les revendications de réparation de la part d’Israël ».  Comme les nazis et ceux qui font leur apologie, Paschoud affirme que la norme pénale sur la discrimination raciale pose une « interdiction générale et absolue de remettre en question les dogmes du procès de Nurenberg ».

Pour le reste, Le Pamphlet diffuse principalement des textes sur les débats du camp des catholiques et nationalistes conservateurs. Mais l’on retrouve périodiquement des textes antisémites, contre l’islam ou ayant des connotations xénophobes, jusqu’aux textes faisant l’apologie de Jean Marie Le Pen et de son Front National. Et bien entendu l’on trouve également des commentaires polémiques à l’encontre les personnes qui s’engagent contre le racisme ou le durcissement de la loi sur l’asile et la loi sur les étrangers. Outre le couple Paschoud, on compte parmi les rédacteurs Michel de Preux, Gérald Beruex ainsi que des auteurs anonymes comme Max l’Impertinent, Pollux et Iratus.

“Le Pamphlet”, fondé par Claude Paschoud, paraît depuis 1970. Le feuillet a connu par moments une diffusion plus importante  (2’000 exemplaires). C’était en 1986, à l’époque ou Mariette Paschoud, enseignante dans le secondaire, était apparue aux côtés du négationniste Henri Roques à une conférence de presse à Paris et avait émis des « doutes sur l’existence des chambres à gaz et des camps de concentration. » En 1991, elle a failli être nommée major dans le service féminin de l’armée suisse, n’était-ce les protestations politiques qui ont entouré cette promotion. Un procès en diffamation entrepris par Mariette Paschoud contre le rédacteur du « Bieler Tagblatt » a fini par se retourner contre la négationniste. Le conseil fédéral a estimé dans un jugement qui fait encore référence aujourd’hui que: « La revendication d’une preuve sur l’existence des chambres à gaz est tellement absurde, au vu de la masse de preuves disponibles, que, même si d’autres motifs sont théoriquement envisageables, la sympathie pour le régime national-socialiste s’impose de façon évidente et suffit comme preuve de vérité.  Surtout si l’on tient compte dans la conclusion d’éléments  telles que des actions et propos tenus, ainsi que d’intentions et de motivations, qui ne représentent néanmoins pas une preuve scientifique  ».

Négation de l’Holocauste

Les révisionnistes nient trois faits historiques patents: premièrement qu’un plan destiné à éliminer les juifs d’Europe ait été élaboré, deuxièmement que des chambres à gaz aient été construites pour éliminer les victimes et, troisièmement, que la persécution des juifs par les nazis se soit soldée par la mort de plusieurs millions de victimes. A l’automne 2005, une bonne part de l’infrastructure des révisionnistes a été anéantie par l’arrestation de Germar Rudolf. Avec l’interdiction de sa maison d’édition active en deux langues, la plus importante des publications négationnistes paraissant en allemand et en anglais ainsi que la page internet ont disparus. De nombreux promoteurs du négationnisme comme Germar Rudolf et Ernst Zündel ont été traduits en justice en 2007. Zündel a écopé de cinq ans de prison et Rudolf de deux ans et demi. Les négationnistes ne sont pas parvenus à faire réagir l’opinion suite à ces jugements.

L’internationale des négationnistes a obtenu en Suisse un soutien explicite et public du PNOS. Le parti demande « la liberté » pour le condamné Ernst Zündel, qu’ils voient – à la manière des néo-nazis – comme une victime de la « justice d’occupation ». Le débat sur l’holocauste aurait toutefois « aucune importance politique ». Le parti prétend toutefois que « l’holocauste représente un matraquage moral aux mains de quelques unités qui l’instrumentalisent pour cimenter leur pouvoir par l’accumulation de capital et le chantage portant sur des montants de plusieurs milliards  ».

Les premiers négationnistes sont apparus au grand jour dans les années 1990. Pendant la campagne référendaire contre l’introduction de la norme pénale sur la discrimination raciale (1994), les quatre orateurs principaux, Jürgen Graf, Arthur Vogt, Andres J. Studer et Bernhard Schaub se sont constitués en « Groupe de travail pour la dé-tabouisation de l’histoire contemporaine », rebaptisé plus tard “Groupe de travail et de recherche en histoire contemporaine” (AEZ). Dans la deuxième moitié des années 1990, l’AEZ a réduit ses activités, suite à quoi les négationnistes alémaniques et leurs camarades romands ont créé l’association “Vérité et Justice” . Cette association a été dissoute en mars 2002 par le tribunal de district de la Veveyse à Châtel-Saint-Denis et a depuis cessé toute activité.
L’ancien secrétaire de l’association René-Louis Berclaz, qui poursuit ses activités malgré la dissolution de l’association, a été arrêté en automne 2006 en Roumanie et assigné à domicile. Les autorités d’enquête ont découvert outre de la propagande raciste, la détention illégale d’armes. En été 2007, le quotidien fribourgeois « La Liberté » informait que Vérité et Justice s’était reformé en Roumanie, sans pour autant annoncer de nouvelles activités . En automne 2007, Berclaz est revenu en Suisse. Selon ses dires, il n’y aurait pas eu de procès, ni d’amende, ni même de caution .

Les négationnistes suisses – à l’exception de Bernhard Schaub et Philippe Brennenstuhl – ne pouvaient plus développer d’activité en Suisse en 2007. Jürgen Graf et Andres J. Studer ont quitté le pays pour échapper à des peines de prison fermes. La page « Wilhelm-Tell-Site » a également disparut de la toile, après avoir cessé depuis plusieurs années d’être alimentée.

Jürgen Graf

Portrait de Jürgen Graf disponible sur son site personnel
Source : internet, homepage de JürgenGraf/archiv Stutz

Jürgen Graf, qui s’est soustrait il y quelques années à une peine de prison en fuyant à l’étranger, vit toujours en Russie. En 2007, il n’a pas publié de livre mais plusieurs textes, dont une critique virulente de l’extrémiste de droite Guillaume Faye, après que celui-ci eut écrit à propos des négationnistes « que ce combat était parfaitement inutile, inefficace et contre-productif, une marotte d’adolescents, et qu’en outre il était entaché de lourdes erreurs méthodologiques ainsi que de préjugés idéologiques » .  Ce commentaire incendiaire a visiblement fâché Jürgen Graf, et il attaque directement Fay dans sa réplique. Le texte de Graf se termine par des tirades antisémites, comme elles étaient usuelles en Allemagne durant l’entre deux guerres et la seconde guerre mondiale. Graf écrit : « La méfiance vis-à-vis des pays  hôtes, la haine de la civilisation européenne en général et du christianisme en particulier est tellement ancrée dans la psyché collective juive – bien entendu il y de nombreux juifs qui ne partagent pas ces sentiments – que la communauté juive tentera de poursuivre son œuvre de destruction dans chaque société européenne, même si cela conduit à une islamisation, qui représente une menace de mort pour les juifs ! » Dans un autre texte, Graf rend hommage à un théoricien des races russe et reconnaît entre autre que ce dernier « a une grande redevance envers les théories raciales du Troisième Reich » .

En janvier 2007, Graf a publié un texte dans le journal du parti du PNOS, le Zeitgeist, dans lequel il affirme que «  tous les jugements prononcés au nom de la « loi muselière » et en particulier ceux contre les révisionnistes sont contraires au droit  ». L’influence de Graf sur le mouvement extrémiste de droite en Suisse s’est toutefois notablement réduite suite à sa fuite en Russie.

Bernhard Schaub

Le négationniste Bernhard Schaub est actuellement le seul extrémiste de droite résidant en Suisse qui est également actif depuis plusieurs années en Allemagne. En novembre 2003 il a participé à la création du « Verein zur Rehabilitierung des wegen Bestreitens des Holocausts verfogten » (VRBHV). Il en est devenu le président et se rend depuis plusieurs années en Allemagne où il est invité à donner des conférences, aussi bien auprès du Nationaldemokratischen Partei Deutschlands (NPD) qu’auprès des plus radicaux des « Freien Kameradschaften ». En décembre 2006, Bernhard Schaub a fait un discours remarqué comme orateur invité à la Conférence de Téhéran rassemblant les négationnistes de l’holocauste. Suite à quoi il a intégré un comité de cinq personnes qui doit organiser de nouvelles activités. Rien n’a transpiré pour l’instant des activités de cette commission.

En Suisse, ce franc-tireur n’a guère obtenu de succès avec son combat. En automne 2006, il avait distribué dans les boîtes-aux-lettres de sa commune de domicile, Arlesheim, des pamphlets négationnistes qui lui avaient valu d’être condamné mi-novembre par le tribunal de district de Dornach-Thierstein à une peine privative de liberté de 80 jours .

Sinon Schaub s’est consacré ces dernières années à développer une « Gymnastique nordique » qui s’inspire d’une part de la démarche anthroposophique, d’autre part de sources nazies. Durant l’été, il a conduit un séminaire dans les Grisons . En automne 2007, la page d’information sur la gymnastique nordique a disparu de l’internet.

Philippe Brennenstuhl

Brennenstuhl, qui a commencé soutenir la cause des négationnistes en tant que caissier de l’association “Vérité et Justice”, dissoute depuis lors . Dans ce contexte, Brennenstuhl a lui-même été condamné pour négation de l’holocauste à une peine de prison stricte.
Dans l’intervalle les pamphlets de Brennenstuhl ont eu quelque écho auprès des milieux d’extrême droite. Le 5 août 2007, il a tenu un discours contre la franc-maçonnerie lors de la réunion d’été du PNOS sur le Grütli, et en novembre lors de l’assemblée générale du parti, il a été donné lecture d’un texte que Brennenstuhl n’avait pas pu lire en septembre 2007 à Jena lors de la « Fête des Peuples ». Il s’occupe par ailleurs à chicaner les autorités avec ses requêtes, en particulier les membres de la Commission du Grütli, responsables de l’organisation de la fête du 1er août sur la prairie du Grütli .

Tout paranoïaque et extrémiste qu’il soit, il a recueilli néanmoins le soutien d’un représentant de l’UDC. Dans un courrier de lecteur, publié en janvier 2007, le président des Jeunes UDC, Berhard Diethelm  regrette d’abord : qu’on ait « consacré la somme démesurée d’un million de francs y compris les mesures policières pour interdire l’accès du Grütli aux extrémistes de droite ». Il continue : « Il est donc normal que le responsable du département de Justice et Police du canton de Schwytz se retrouve empêtré dans une plainte pour déni de la liberté d’expression, abus de fonction et contrainte.  Dans ce contexte, je félicite M. Brennenstuhl qui s’est donné la peine de s’opposer aux manquements des membres de la Commission du Grütli et du Conseil d’état. Sa brochure « Der Verrat-1er août 2006 sur le Grütli » mérite d’être reconnue. » Diethelm tentera après coup de s’en sortir. A un article critique dans le journal Bote der Uhrschweiz, il réagira même par une requête – ultérieurement rejetée –  au Conseil suisse de la presse .

Ouverture du côté de la droite radicalisée

Les frontières entre extrémisme de droite et nationalisme conservateur sont fluctuantes, également en Suisse. De temps à autre, l’UDC utilise aussi des concepts émanant de la mouvance d’extrême droite. Par exemple, lorsqu’elle tente de discréditer ses adversaires politiques en les désignant comme des partis dépendants du « système », comme l’a fait le président de l’UDC Ueli Maurer lors de la non-réélection du conseiller fédéral Christoph Blocher . Dans l’ensemble, l’UDC ne veut pas se préoccuper des tendances se situant à droite de sa ligne politique. Comme l’avait déclaré aussi bien Christoph Blocher que le conseiller national Christoph Mörgeli : « Il ne doit pas y avoir de parti démocratique à droite de l’UDC ». Plus tard il a ajouté : « Si l’on veut hériter, il faut se comporter de manière aussi agréable que la vieille tante testatrice» . Le fait est que l’UDC a absorbé les autres partis de droite (comme le Parti de la Liberté) ou alors elle les a évincés (comme les Démocrates Suisses) . Parfois un représentant de l’UDC profite de l’occasion qui lui est offerte de se présenter dans les cercles d’extrême droite, par exemple Ulrich Schlüer qui est apparu en décembre 2006 à Munich dans une table ronde organisée par la Bruderschaft Danubia. Commentaire de la rédaction : « Une organisation d’extrême droite notoire » .
Toujours est-il que la collaboration avec les néonazis contribue à mettre rapidement un terme à une jeune carrière politique. C’est ce qui est arrivé à Roland Wagner, vice-président des Démocrates Suisses, après qu’il eut fait dans une maison de tir d’un groupe de néonazis allemands la démonstration du fusil d’assaut helvétique. Peu après la publication du communiqué de presse, il a démissionné du parti . Mais il était trop tard pour retirer sa candidature au conseil national. Les Démocrates Suisses ont obtenu 0,66% dans le canton d’Argovie et Roland Wagner 2’067 voix sur l’ensemble du canton.

 

Conclusion

L’extrémisme de droite en Suisse en 2007 demeure une réalité politique et sociale. Même les représentants du camp nationaliste conservateur ont tendance à nier ou du moins à minimiser son importance. Si ce milieu reste marginal, il n’a pourtant jamais été numériquement aussi fort depuis 1945. La subculture des skinheads à tendance nazie, proportionnellement le groupe le plus important en 2007, n’a connu qu’une faible croissance. C’est avant tout dans les petites villes et les villages que sont apparues des cliques ou groupuscules d’extrême droite, qui se posent en ennemis aussi bien des “gauchistes” que des “étrangers”. La subculture skinhead-nazie dispose d’une offre stable de manifestations, généralement sous forme de groupes de musique et de concerts. Ces organisations ou individus contribuent en permanence à la formation d’une idéologie d’extrême droite par des activités de nature politico-culturelles, sans toutefois participer à la politique institutionnelle.
Les principaux promoteurs sont déjà âgés, de sorte que leurs projets vont disparaître de la scène à brève ou moyenne échéance. L’élément le plus surprenant est la création pour la première fois d’une organisation d’extrême droite exclusivement féminine. La mouvance d’extrême droite dispose néanmoins d’un parti politique, le parti nationaliste suisse (PNOS). Depuis 1945, aucun parti/groupe d’extrême droite ne s’était maintenu aussi longtemps.
Les négationnistes suisses ne se sont plus manifestés, à l’exception de deux individus menant un combat isolé. Toutefois la pensée négationniste, à savoir la négation ou la minimisation de l’holocauste, est parvenue à s’imposer auprès d’une partie du public d’extrême droite.

Hans Stutz

Lucerne, 15 janvier 2008